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MANTE RELIGIEUSE JIZAI OKIMONO

Référence : 2025-1385

Imposant jizai okimono ou sculpture articulée entièrement réalisée en fer martelé et signé Myochin, référant à une illustre famille de forgerons. Bien qu’a l’origine une famille d’artisans dont la généalogie remonterai au 4ème siècle la renommée de cette famille a commencé sous l’ère de Heian (784-1184) lorsqu’elle reçut son nom « Myochin » (littéralement : « lumière rare ») de l’empereur Konoe au XII -ème siècle. A partir du XVI ème siècle l’atelier devint une école dont le style et l’influence des progrès technique ce diffusa partout sur l’archipel au point de devenir en 1794 fournisseurs du bakufu, et de fournir les armures pour le gouvernement shogunal et donc autant aux guerriers d’élites qu’aux puissants. Enfin les forgerons de l’école purent voir de leurs yeux le Japon se moderniser en quelques décennie sous l’ère Meiji. En 1876 fut proclamé le décret Haitōrei, celui-ci interdit le port du sabre a tout autre personne que les militaires et les policiers. Cette mesure avait comme but de diminuer l’influence des samouraïs, de moderniser l’armée impériale et d’éviter une deuxième révolte similaire à la guerre de Boshin. Cette interdiction conduit à un déclin de la production de katanas, et d’armures. De nombreux forgerons se trouvèrent contraints de se renouveler ou de se tourner vers d’autres métiers. Nombreux sont les artisans spécialisés qui se lancèrent dans la fabrication d’outils, de couteaux et même de cloche et de carillons (furin). Toutefois une forme d’art singulière se détache de cette complexe période de transition : les jizai. Alors que les armuriers les plus minutieux, chargés de la réalisation des kabuto (casque) et des maedate (ornements familiaux généralement en bronze tenant lieu d’armoirie) se retrouvèrent sans clients, ils eurent l’idée de produire de très fine sculpture réalisée de nature, combinant à la fois le réalisme saisissant de certains maedate avec l’ingénierie articulatoire des plus belles pièces d’armures.
Les Jizai Okimono sont des sculptures réalistes d’animaux, que l’on divise généralement dans les catégories suivantes : les oiseaux, les crustacés, les insectes, mais aussi des animaux imaginaires tels que des dragons et des shachi (monstre aquatique similaire au poisson). Généralement réalisés à partir de fer, de cuivre de shibuichi (alliage de cuivre et d’argent) ou de shakudo (alliage de cuivre et d’or) mais aussi parfois en bois de cerf ou en ivoire. Leur corps et leurs membres sont articulés, et peuvent être déplacés à l’identique d’un animal vivant. Ce genre d’okimono (objet décoratif) sont peu connus au Japon parce qu’ils ont surtout été exportés et ce du début la période Meiji à la fin de l’ère Showa.
Les Jizai Okimono ont commencé à susciter l’intérêt du public japonais en Octobre 1983 lorsque plusieurs modèles ont été présentés lors d’une exposition particulière sur « L’art du métal Japonais » qui s’est tenue au Musée National de Tokyo. Les pièces exposées comptaient un dragon, un faucon, un shachi, une carpe, un homard et un crabe. Peu après, un certain nombre d’animaux Jizai du British Museum ont été présentés aux expositions « Chefs d’œuvres de l’art japonais et chinois du British Museum » en 1987 au Musée National de Tokyo et « Daei Hakubutsukan Hizo Edo Bijutsu Ten (Exposition de l’art de la période Edo des collections du British Museum) » réalisée en 1990 au Tokyo Metropolitan Art Museum.
L’intérêt du public pour les Jizai okimono a continué à grandir lorsque s’est tenue l’exposition « L’art d’Orient et d’Occident dans les expositions universelles » de Juillet 2004 à Mars 2005 au Musée national de Tokyo, au Musée municipal d’art d’Osaka et au Musée de la ville de Nagoya et qui comprenait un dragon, une carpe et une mante religieuse, provenant des collections japonaises ainsi qu’un homard, prêt du Linden Museum de Stuttgart.
Déjà en 1888, le magazine français Le Japon Artistique publiait des illustrations détaillées et une explication d’une grenouille articulée réalisée par Myochin Muneharu. Ils ont également fait leur apparition dans les ventes aux enchères d’art Japonais dès les premiers temps.
Les insectes sont fabriqués foncièrement de la même façon que les crustacés, joignant les pattes à l’aide de rivets. Les ailes des papillons et des libellules sont attachées au corps avec des charnières pour les rendre mobiles, tandis que celles des scarabées et des mantes religieuses, qui recouvrent les ailes plus légères, peuvent être ouvertes pour déployer les ailes plus fragiles.
Au japon on appelle la mante kamakiri, (カマキリ) mot se référant au verbe faucher et à cet outil, bien que doté d’ailes les mantes ne peuvent voler que sur de très courtes distances, elles font partie des prédateurs opportunistes qui attendent leurs proies de longues heures immobiles. L’espèce nommée Okamakiri est la plus imposante des neuf espèces présentes au japon et peut atteindre les neuf centimètres de long.
Les mantes sont des insectes fascinants, à la fois apparentés aux termites et aux blattes. Elles sont effectivement considérées comme opportunistes à tel point qu’elles mangeront n’importe quoi leur passant sous la patte, y compris un congénère. Le cannibalisme est un phénomène récurrent entre mantes, surtout lors de la saison des amours. Parfois les femelles consomment leur partenaire avant même que l’accouplement soit achevé. Bien que les Japonais collectionnent les insectes qu’ils appellent mushi, et que la mante soit une prise fréquente, il semblerait que cet insecte n’ait pas une grande importance culturelle comparé à l’escargot, au papillon, à la libellule ou même à la luciole qui ont chacun leurs chansons poèmes et mythes. Néanmoins il est toujours possible de trouver une occurrence récente de cet insecte dans la culture populaire nippone, démontrant qu’il est traité de longue date dans l’art du Japon. Par exemple avec l’édition d’un timbre de 700¥ réalisé en 1995 à partir d’une estampe de l’ère Edo signée par Sakai Hoitsu, et intitulée « Hibiscus, Chrysanthèmes et Mantes en Automne. » (Aki no Fuyō to Kiku to Kamakiri=秋の芙蓉と菊とカマキ).
On retrouve la mante religieuse dans beaucoup de champs et de jardin ce qui l’associe dans l’imaginaire collectif nippon à une « nature sauvage » que l’on observe fréquemment lors de fêtes traditionnelles d’été et d’automne. Le calendrier antique japonais est un calendrier luni-solaire ancestral qui découpe l’année en 72 micro-saisons de quelques jours seulement. Chacune d’entre elles est associée à un événement naturel caractéristique de la période dans laquelle elle s’inscrit. En effet c’est au milieu de la saison estivale (夏 Natsu) qu’a lieu Bôshu (芒種) une micro-saison associée aux moissons, un moment unique pour observer la profusion d’insectes. Notamment les lucioles et les mantes religieuse en chasse dans les herbes hautes.
C’est à l’issu de cette période qu’a lieu la fête de Kajô no hi (嘉祥の日), le jour des confiseries. Mais aussi la célébration de celle de Tsukimi, fête estivale célébrant la fin de l’été, remerciant la déesse lunaire par des offrandes pour la réussite des moissons. Tout cela demeurant un prétexte pour admirer la beauté de la lune d’automne.
Japon – ère Meiji (1868-1912)
Hauteur : 12 cm – longueur : 20 cm – largeur du corps : 1.5 cm – envergure : 21 cm

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